Chris Wilkins le fo(u)ssoyeur des anciens éditeurs européens
Comme vous avez pu le constater sur le site, les nouveaux ouvrages sont légions et de plus en plus de sujets différents sont traités dans le domaine du jeu vidéo. Dans le sous-genre du rétrogaming, Pix’n Love règne en maître avec des livres qui sortent régulièrement sur des sujets aussi variés qu’intéressant comme l’histoire du jeu vidéo. Cependant certains propos ne sont pas abordés comme l’histoire de certains éditeurs européens. Ça tombe bien car c’est précisément ce qu’a choisi de traiter Chris Wilkins (à droite sur la photo) à travers, pour le moment, de deux ouvrages (disponible en anglais uniquement), Ocean the history et The Story of U.S. Gold (toujours sur Kickstarter et auquel vous pouvez continuer de contribuer). Naturellement nous voulions en savoir plus sur cet entrepreneur anglais qui a fait des pieds et des mains pour retrouver les personnes qui ont façonné l’Europe des jeux vidéo.
RetroGamer.ca : Peux-tu nous dire plus sur toi et ta carrière avant le lancement du livre Ocean the history ?
Chris Wilkins : Mon premier contact avec les ordinateurs a été à l’école où nous avions un certain nombre de Commodore Pet qui faisait tourner un langage de programmation simple appelé CECIL. J’étais totalement fasciné, tellement que je me rendais dans la salle des ordinateurs le midi alors que tout le monde était dehors en train de jouer au foot ! À ce moment-là les enfants plus chanceux recevaient des ZX 81 [NDR : un micro-ordinateur du fabricant Sinclair] pour Noël et les amenaient à l’école pour se la jouer. Parmi ceux-ci certains ont eu la présence d’esprit de commencer à programmer leurs propres jeux dans un autre langage, le BASIC [NDR : langage qui a fêté ses 50 ans il y a deux mois]. Je voulais mon propre ordinateur. Je suppliais ma mère pour avoir un micro-ordinateur au Noël suivant. En plus à ce moment-là Sir Clive Sinclair avait fait le ZX Spectrum et le moteur Sinclair PR faisait les gros titres dans la presse et à la TV. J’ai dit à ma mère que ça m’aiderait à avoir de meilleures notes à l’école. Elle m’a cru et la suite, on la connait, le Père Noël m’apporta un Spectrum 48K flambant neuf et ma relation amoureuse avec les ordinateurs commença.
Entre 1982 et 1986 j’ai donc surtout joué à tous les classiques du ZX Spectrum que je pouvais trouver en magasin mais aussi grâce au terrain propice à la copie. Cela ne m’a pas empêché de bichonner mon micro-ordinateur en lui faisant plein de cadeaux comme le set d’extension ZX, le clavier DK’tronics, l’imprimante thermique Aplhacom 32, l’Interface 2, le Currah Speech Synthetiser et tant d’autres ! J’ai utilisé un langage BASIC étendu sur le Spectrum appelé YS Megabasic qui était vendu par Your Sinclair, un magazine britannique populaire à ce moment-là. Je l’ai utilisé à l’école pour mon projet sur ordinateur qui consistait en une application de tenue de comptes et j’ai eu de très bonnes notes pour ça.
Je suis ensuite allé à l’université et j’ai obtenu un diplôme en études informatiques ainsi qu’un Amiga de Commodore en même temps. C’était ma machine préférée pendant des années avec que le PC ne devienne un standard et prenne le dessus. Mes premiers boulots après l’université et dans les technologies de l’information était dans la programmation : langages de 4ème génération [NDLR : langages de programmation dits de haut niveau comme le SQL, le Maple ou encore le GNU R], développement d’assurance, gestion d’argent et logiciels domestique. J’ai ensuite évolué vers la gestion d’équipe puis la gestion de projet et ensuite la direction de projet pour aboutir à la direction de programme où je suis actuellement.
RetroGamer.ca : Comment et quand a-tu décidé de rédiger des livres entiers sur des anciens éditeurs européens aujourd’hui disparus ?
Chris : J’ai créé un fanzine que j’avais appelé Retro Fusion que j’ai voulu le plus professionnel possible. C’était en 2006 et au total quatre numéros ont été faits de 72 pages chacun et imprimés dans des couleurs de haute qualité. Deux numéros ont été vendus dans un magasin britannique appelé Gamestation. [Grâce à cette expérience] j’ai pu apprendre ce qui était bien et moins bien dans un magazine et ce que lectorat amateur de rétro aimait lire et je suis parti de ce postulat.
Avec les années j’ai pu rencontrer et faire la connaissance de nombreux développeurs qui faisaient les jeux auxquels je jouais étant petit, comme par exemple Sandy White (Ant Attack), Archer Maclean (Dropzone, IK+, Jimmy White’s Snooker), Philip et Andrew Oliver (Dizzy et bien d’autres) et aussi Simon Butler (Ocean Software). J’ai aussi pu faire la connaissance de Roger Kean et d’Oliver Frey de Newsfield Publications. Ces gars-là ont bercé ma jeunesse avec leur magazine Crash dédié au ZX Spectrum. Ils ont aussi fait Zzap! 64 consacré aux machines de Commodore et Amtix pour l’Amstrad.
Grâce à Simon Butler, j’ai pu rencontrer l’ancienne équipe d’Ocean Software y compris Gary Bracey. Alors que nous étions en train de réfléchir à un nouveau projet, il nous a semblé logique de rédiger un ouvrage sur Ocean Software. Gary a fait en sorte que je puisse rencontrer les personnes clés de la société et donc le livre a été fait avec mon héros d’enfance, Roger. Le nouveau Kickstarter pour le livre sur U.S. Gold semblait un choix d’entreprise tout aussi logique après avoir traité d’Ocean dans le premier livre. En effet les deux sociétés étaient en concurrence très forte à l’époque bien qu’Ocean ait fait de nombreuses versions des jeux (exceptées les versions Commodore 64) qu’U.S. Gold importait des États-Unis ce qui rendait leur relation professionnelle presque symbiotique. J’ai donc contacté Geoff Brown, qui a fondé U.S. Gold, et il m’a dit se sentir privilégié que j’ai choisi son ancienne société comme sujet de mon prochain ouvrage.
RetroGamer.ca : Est-ce que Kickstarter a été un choix délibéré dès le départ ou est-ce venu après ?
Chris : Je me suis essayé à IndieGOGO quand j’ai voulu récolter des fonds pour le troisième numéro de Retro Fusion. En fait Kickstarter n’était pas encore disponible au Royaume-Uni et je ne pouvais pas utiliser la version américaine du site. Lorsque Kickstarter a été enfin disponible nous avons délibérément choisi de l’utiliser, d’autant plus que mes expériences précédentes m’ont permis de comprendre au mieux les médias sociaux. Donc les utiliser sur Kickstarter était tout ce qu’il y avait de plus logique.
RetroGamer.ca : Jusqu’à maintenant, quelle a été ta plus grosse difficulté ? Les recherches ? Trouver des gens de cette époque ?
Chris : Pour le livre sur Ocean, je dirai que c’était la crédibilité. Rends-toi compte, je disais que je voulais écrire un livre sur l’un des plus grands, sinon le plus grand, studios de développement britannique et les rumeurs et spéculations racontaient que je n’arriverai jamais à rencontrer David Ward et Jon Woods soient les personnes les plus importantes. J’ai une politique de vie qui est de dire “il ne faut jamais dire jamais” ce qui m’a permis de réunir un après-midi, David, Jon, Roger et moi-même dans la maison de Jon en mai 2012 pour que l’on discute en détails du studio de développement qu’ils ont créé il y a 30 ans à l’arrière. Après quoi j’ai pu discuter avec plus de 50 personnes ayant travaillé au studio, la plupart d’entre eux apparaissant dans le livre.
RetroGamer.ca : As-tu l’intention de t’établir en tant qu’éditeur ?
Chris : Les livres sont édités au travers de Revival Retro Events une société que je gère pour mettre en place des événements de retrogaming ici au Royaume-Uni. Le prochain est d’ailleurs en août et on attend la visite de John Romero qui fait tout le chemin depuis la Californie pour se mesurer au pays entier sur des Deathmacth sur Doom et Quake.
RetroGamer.ca : As-tu été contacté par des maisons d’édition existantes ?
Chris : Pix’n Love était extrêmement intéressé à produire une version française du livre sur Ocean et nous sommes restés en contact tout au long du développement de l’ouvrage. En fait comme Ocean avec un bureau en France, nous nous sommes mis d’accord pour que Pix’n Love ait son propre chapitre racontant le point de vue français du studio de développement. Une fois livre terminé et quand ils ont reçu leur copie, ils n’ont pas été avares en compliments. Cependant après des mois et des mois d’attente on dirait bien qu’ils ont changé d’avis. Je suis actuellement en pourparlers avec un autre éditeur britannique qui est très intéressé pour faire une seconde version du livre en anglais. Nous verrons ce que cela donne.
RetroGamer.ca : Envisages-tu de faire traduire ton livre, en français par exemple, afin d’élargir ton public ?
Chris : Oui, si le bon éditeur nous contacte.
RetroGamer.ca : En tant que joueur, quel est ton jeu favori ?
Chris : Mon jeu rétro préféré est probablement Sonic the Hedgehog. J’y ai joué sur tellement de machines différentes depuis ses début sur la Mega Drive / Genesis de SEGA. Pour les jeux plus récents, mon choix va à Fallout 3 sur Xbox 360. J’ai passé énormément de temps et perdu énormément de journées de ma vie pour terminer complètement le jeu et ce, de différentes façons !
RetroGamer.ca : Joues-tu toujours aux jeux vidéo ? Aux jeux rétro ?
Chris : Oui, en plus de la PS4 et de la Xbox One, j’ai également un certain nombre de machines anciennes. Le jeu auquel je suis en train de jouer en ce moment est InFamous Second Son sur PS4 et il est incroyable. Après l’avoir terminé il y a un moment sur PS3, j’attends aussi avec impatience la version améliorée de The Last of Us qui sortira sur PS4 également. Je possède aussi des bornes d’arcade de Frogger, Super Cobra et Scramble.
RetroGamer.ca : Et pour terminer, quelle est ton opinion sur les jeux de maintenant (current gen, next gen) ?
Chris : J’adore les technologies, donc quand une nouvelle console sort, je me dois de l’avoir. Ça s’est vérifié sur tout excepté la Wii U que je ne possède toujours pas bien que je sois de plus en plus tenté depuis la sortie de Mario Kart 8. La PS4 est une machine incroyable et ma console de choix maintenant. Je trépigne d’impatience à l’idée de voir les jeux que les développeurs seront capables de concevoir dans le futur car pour l’instant la console a été seulement effleurée et elle a vraiment plus à offrir.
Merci à Chris pour son temps et pour l’exemplaire du livre gracieusement envoyé dont nous vous ferons la critique une fois la lecture terminée mais ça se présente bien. En attendant vous pouvez toujours continuer de le soutenir pour son prochain projet ou de commander son livre sur Ocean au prix de £31 pour les pays européens sauf le Royaume-Uni ou £35 pour le reste du monde donc le Canada. Cependant il existe une version PDF au prix de £5 si vous préférez opter pour la version numérique.
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