R.I.P Commodore, 20 ans déjà
Le 29 avril 1994 est un jour sombre dans l’histoire de l’informatique personnelle et professionnelle. Ce jour maudit a vu la disparition définitive de la marque qui a mis au monde les micro-ordinateurs les plus mythiques qui soient. Après 40 ans d’existence, Commodore a autant apporté à la micro-informatique que Apple ou IBM. Certains diront même plus. Mais revenons un peu en arrière pour comprendre pourquoi.
Fondée par Jack Tramiel, un rescapé d’Auschwitz, c’est en 1954 à Toronto au Canada, que Commodore International est née. Tout d’abord une société spécialisée dans les machines à écrire, elle a prit le chemin des machines à additionner (calculatrices mécaniques) à la fin des années 50 pour se diversifier et ainsi éviter la concurrence japonaise qui commençait à envahir le marché nord-américain. Ce fut aussi l’occasion de renommer l’entreprise, et c’est ainsi que la dénomination Commodore Business Machines (CBM) fut choisie.

Durant les années 60 c’est au tour des calculatrices électroniques d’être produites chez Commodore, et au début des années 70 cette production fut très profitable pour la société de Tramiel. Mais voilà qu’en 1975, Texas Instruments vint changer la donne en vendant des modèles concurrents de très bonne qualité vendues à un prix plus bas. Afin de rester concurrentiel et baisser ses coûts de production, il fut décidé d’investir dans MOS Technology une société produisant des puces informatiques, qui devint finalement la propriété de Commodore.
Grâce à cette union/fusion une personnalité très importante dans l’histoire de la société fut transférée de MOS chez Commodore à la tête de l’équipe d’ingénierie : Chuck Peddle. C’est lui qui, voyant le déclin du marché des calculatrices, poussa Tramiel à investir dans la micro-informatique.
L’arrivée de la micro-informatique
C’est en 1977, après un parcours de développement très court et semé d’embûches, que Peddle et son équipe présentèrent au CES de Las Vegas le Commodore PET 2001 et son fameux clavier aux touches de calculatrice.

C’est un marché essentiellement éducatif et corporatif que le PET a touché, certainement en rapport avec sa construction solide, son écran monochrome et lecteur de cassettes intégrés. Plusieurs déclinaisons du PET optimisées et mieux adaptées virent le jour dans les années qui suivirent.
À la suite de l’apparition du RadioShack TRS-80, de l’Apple II et du Texas Instruments TI-99, il était devenu clair que Commodore ne possédait pas la machine adéquate pour faire face à la concurrence de plus en plus audacieuse et surtout mieux implantée dans les foyers. La réponse fut le VIC-20.
Le jeu vidéo entre en scène sur 8 bits
Nous sommes en 1981 et le but d’offrir aux familles un ordinateur doté d’une excellente puce sonore, de graphismes en couleurs et d’un processeur plus puissant pour un prix modique est atteint. Le VIC-20 vendu 299$, avec ses 16 couleurs, 5Ko de RAM et un son mono fut un vrai succès, y compris en termes de jeu vidéo, mais c’était sans compter sur la sortie du modèle qui allait tout changer seulement un an plus tard : le Commodore 64.
Vendu à plus de 20 millions d’exemplaires sur le cours de sa carrière, cette formidable machine est considérée comme étant le berceau de la “Demo Scene“. Même avec un prix plus élevé que son prédécesseur, le C64, fort de ses 64Ko de RAM, de son processeur 6510 et de sa célébrissime puce sonore SID s’est imposé comme la machine de jeu par excellence pendant des années face à la concurrence telle que l’Atari 400/800. Un modèle portable fut aussi mis sur le marché sous le nom de SX64. Et n’oublions pas aussi que la gamme était composée d’autres modèles avec le Plus/4 et le C16 moins onéreux mais aussi moins performants.
La succession de la ligne 8 bits fut prise par le Commodore 128, un modèle hautement amélioré avec entre autres 128Ko de RAM, un processeur plus rapide, un affichage 40/80 colonnes et la possibilité de faire du double écran ! Il s’est tout de même vendu à quasiment 6 millions d’exemplaires.
Les années 16/32 bits
En janvier 1984, après des différends internes avec le conseil d’administration, Jack Tramiel démissionne et fonde sa propre société. La branche grand public d’Atari en grande difficulté financière suite au krach du jeu vidéo fut rachetée par Tramel Technology en juin 1984. La légende veut, bien que j’ai eu confirmation récemment d’une source sûre, que Tramiel serait parti avec les plans du prototype Z8000, un ordinateur 16bits toujours à l’état de projet chez Commodore, qui aurait par la suite donné naissance à l’Atari ST…

C’est au cours de cette même année que Commodore racheta la petite société Amiga qui avait entre les mains un projet très prometteur dirigé par Jay Miner. C’est ainsi que naquit l’Amiga 1000 présenté à l’automne 1985 pour 1295$ face à l’Atari 520ST déjà sur le marché depuis plusieurs mois au prix de 799$. Une bataille difficile s’annonçait. Malgré une plate-forme technique très en avance sur son temps, grâce à un processeur Motorola 68000 puissant et au chipset OCS (des co-processeurs graphiques et sons nommés Paula, Denise et Agnus), la première partie de la vie de la série Amiga n’est pas couronnée d’un franc succès et même si le 1000 trouve un peu sa place en entreprise, il a du mal à s’installer dans les familles et laisse la place de meneur à Atari.

C’est en octobre 1987 que le début du basculement du marché va opérer avec l’arrivée de l’Amiga 500, un modèle grand public beaucoup plus accessible à 699$ (799$ avec l’écran) mais aucunement moins puissant que le 1000. Maintenant aussi cher que son concurrent il fut malgré tout un énorme succès commercial et de cœur. C’est ce modèle qui a fait et fait encore la réputation de la série Amiga. C’est aussi sur cette machine qu’une production vidéoludique sans précédent vit le jour.
Pendant des années une guerre commerciale fait rage entre Atari et Commodore. Les utilisateurs se sont fait les soldats de cette guerre transformant certaines discussions en confrontations quasi religieuses !
Les années suivantes ont vu l’arrivée de toute une gamme d’ordinateurs Amiga avec les modèles professionnels aux grandes capacités d’extension : Amiga 2000, 3000, 4000; mais aussi une suite de modèles tout public avec le 500+, le 600, le 1200 équipés de plus de mémoire et/ou de processeurs plus puissants ; et enfin des défis audacieux tels que la plateforme multimédia de salon CDTV qui n’est autre qu’un Amiga 500+ équipé d’un lecteur CD-Rom placé dans un boitier de type Hi-Fi.
La série professionnelle fut très acceptée et implantée dans les studios de télévision car épaulée par le Video Toaster, une carte d’extension produite par NewTek capable d’aider au montage et au titrage de la vidéo en définition standard.

Finalement fin 1993 dans une dernière tentative de s’imposer sur le marché et relancer la machine, Commodore sort une console de jeu, la CD32. Basée sur un Amiga 1200 et son chipset AGA capable d’afficher 256 couleurs simultanées, elle est la première console occidentale 32 bits équipée d’un CD-Rom. Encore en avance sur son temps et en sévère détresse financière, Commodore n’aura pas les moyens financiers d’acheter assez de ses composants onéreux pour suivre la demande et ne pourra en construire que 100.000 pour l’Europe avant la fermeture définitive de la société.
Fort d’une communauté ultra active on le voit toujours dominer dans les demo party et étoffer sa logithèque grâce au homebrew, l’Amiga n’a jamais été aussi vivant qu’aujourd’hui.
Mehdi Ali, le président mal aimé
Commodore a déclaré officiellement banqueroute le 29 avril 1994, suite à une gestion désastreuse uniquement orientée sur le profit et non plus l’innovation. De tous les témoignages que l’on peut encore trouver çà et là, les employés, les techniciens et les ingénieurs de Commodore avaient vraiment à cœur le succès de leur entreprise et l’implication était totale. C’est pour cela que Dave Haynie et Bil Herd par exemple, font encore des conférences afin de raconter leur expérience passée dans l’entreprise.
Mehdi Ali, président de la société de 1989 à 1994, reste aux yeux des anciens employés le grand responsable de la chute inexorable de la société. Aveuglé par les profits et ne faisant pas confiance à ses équipes, il n’a pas su tenir le cap face à la montée en puissance du PC et du Macintosh depuis le début des années 80, enchaînant les erreurs de jugement.
À noter, Dave Haynie le Lead Engineer sur la série Amiga professionnelle, a réalisé un documentaire sur les derniers jours de Commodore : The Deathbed Vigil and other tales of digital angst. En voici un extrait assez déprimant sur le dernier jour du quartier général de West Chester en Pennsylvanie, entièrement monté sur Amiga bien sûr !
L’après Commodore Business Machines
La seule société qui fut capable de faire perdurer un peu l’expérience Amiga est ESCOM. Cette entreprise allemande a vendu pendant 2 ans des Amiga 1200 et 4000, provenant des invendus de Commodore et aussi par la suite des modèles refabriqués par leurs soins. Par la suite, plusieurs tentatives de ré-utilisation de la marque ont été faites dans les 20 dernières années sans succès. La marque fut entre autres achetée en Hollande afin de produire des PC haut de gamme. Elle a aussi été relancée aux États-Unis par le biais de Commodore USA, une société proposant des PC (encore) sous Linux mais dans des boîtiers “classiques” comme le C64x. Créée en 2010, la marque a tenté de ressortir des ordinateurs Amiga (encore du PC) mais les résultats financiers et la réception par les fan n’étaient pas très prometteurs. L’aventure a été stoppée nette avec le malheureux décès de son créateur, Barry Altman, fin 2012.
Les jeux à faire absolument
Les 10 meilleurs jeux C64 selon le classement de Lemon64 :
- Zak McKracken
- Maniac Mansion
- Wasteland
- Pirates!
- IK+
- Ultima IV
- Last Ninja 2
- Archon
- Turrican II
- Prince of Persia
Les 10 meilleurs jeux Amiga selon le classement de LemonAmiga :
- Secret of Monkey Island
- Monkey Island 2: Lechuck’s Revenge
- Lemmings
- Cannon Fodder
- The Settlers
- Sensible World of Soccer
- Another World
- Simon the Sorcerer (AGA)
- Slamtilt (AGA)
- UFO: Enemy Unknown
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